9 L’ENFANT DU VOISIN.
Il est dit que depuis le péché originel, l'homme est devenu un être qui fait du mal.
Mais ce qui est plus incompréhensible et écœurant, est la cruauté avec laquelle il fait le mal et l’énergie déterminée avec laquelle il riposte quand on veut lui rendre la monnaie.
Ce n’est pour rien que nos grands-parents disaient que « le bourreau a peur de la cognée ».
Un homme avait semé des calebassiers.
Pour les protéger contre les intempéries de tout genre, il alla demander les grillages de son voisin, ami et parent.
C’est le moment où les plantes étaient en maturité que le voisin choisit de réclamer ses grillages.
Pour qui connaît bien les calebassiers ; on sait qu’ils font des ramifications au-delà des grillages et que si on veut ces grillages, cela signifie qu’il faut obligatoirement détruire les plantes.
Le propriétaire des grillages le savait très bien mais comme il voulait faire mal à son voisin, il décida de les réclamer coûte que coûte.
L’homme expliqua tous les enjeux et les risques auxquels ses plantes étaient exposées s’il rendait maintenant les grillages.
Mais comme le disaient encore nos grands-parents :
« L’âne qui refuse de marcher n’est pas un âne aveugle.
Il voit très bien la route mais décide autrement ».
Comme le propriétaire ne voulait rien entendre de ses supplications, il alla alors demander la médiation des notables du village.
C’était peine perdue car la décision de son voisin était irrévocable et catégorique.
Puisqu’ « à l’impossible nul n’est tenu », l’homme coupa précocement les calebassiers.
C'est avec amertume et regret qu’il remit à son voisin les fameux grillages et réussit néanmoins à cueillir quelques calebasses qu’il vendit.
Il en a fait une petite bonne affaire mais cela aurait été meilleur si son voisin lui avait laissé le temps nécessaire.
De retour du marché, il étala sa natte sur sa terrasse et commença à compter son gain.
Lhomme n’a pas su comment et à quel moment un petit enfant s’est saisi de l’une de ses pièces rares et l’avala.
Ce petit enfant n'était autre que celui de son voisin peu gentil.
« La vengeance étant un plat qui se mange à chaud », l’homme appela immédiatement son voisin et lui expliqua les faits avec preuve à l’appui avant de conclure qu'il souhaite obtenir le remboursement de sa monnaie.
Le voisin rentra dans sa case et revint avec une pièce de même valeur pour lui remettre.
C’était contre toute attente que le propriétaire de la pièce laissa entendre qu'il voulait la même pièce et non une autre.
Le voisin commença la négociation qui s'est vite révélée vaine.
Les deux voisins se trainèrent encore chez les notables du village.
Sans difficulté et tracasserie, le verdict tomba :
l’enfant sera égorgé pour qu'on puisse récupérer la pièce pour son propriétaire.
Les supplications du père ne portèrent pas fruits.
Il faut « rendre à César, ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ».
Puisque nul ne peut dire avec certitude de quel côté va souffler le vent, il faut faire preuve de tolérance dans nos rapports quotidiens avec nos semblables si nous voulons bénéficier un jour de la pitié des autres.
Si nous vivons dans un milieu intolérant où règne la logique de « dent pour dent et œil par œil », nous ne faisons pas la preuve du progrès de notre monde ni de notre différence avec les animaux.