
13 LE TRAVAIL ET RIEN QUE LE TRAVAIL.
Dans la vie, les hommes se réjouissent toujours de l’échec de leurs semblables et jalousent leur succès.
En clair, si vous échouez dans vos projets, votre entourage est enthousiaste mais apparemment, il vous fera croire qu’il n’est pas content.
En revanche, si vous réussissez, vos semblables feignent de partager le bonheur avec vous, mais ne soyez pas dupe car cette attitude n'est qu'apparente et, très souvent, très hypocrite.
La preuve de ce constat est que vos succès suscitent à la fois, pour les uns l’envie de réussir comme vous mais sans effort et les autres la jalousie, l’envie de détruire ce que vous avez construit.
Cette réalité, Baloum, l’a sue dans ce village où il était connu comme meilleur cultivateur.
Quelques soient les caprices de la saison hivernale, ses récoltes étaient abondantes et ses greniers toujours bien remplis.
Au moment où les autres habitants tiraient le diable par la queue, c'est-à-dire au moment où la famine frappait la contrée, cette période bien connue et appelée période de soudure, Baloum, quant à lui ne vidait que les récoltes des deux ou des trois années écoulées.
Cet état des faits montre bien qu’il était le plus nanti du village.
Loin d’être une félicité, cela faisait l’objet de polémiques et de jalousie.
Les gens du village le soupçonnaient de disposer de gris-gris lui permettant d'avoir de bonnes récoltes.
Tout le village avait fini par être envahi par ces calomnies.
Mais cette diffamation n’était que le résultat d’un manque d’analyse et la somme d’une jalousie généralisée.
Personne n’a eu le courage de voir derrière la réussite de Baloum, le soin qu’il accordait aux préparatifs des périodes de semences.
Autrement, ses activités pré-hivernales étaient totalement ignorées alors que ce sont elles qui marquaient la différence entre lui et les autres.
Un jour, il reçut la visite de deux jeunes hommes du même village que lui.
L’entretien fut porté sur la demande de ces jeunes de leur octroyer ce fameux gris-gris des bonnes récoltes afin qu’ils puissent faire des bonnes affaires comme lui, Baloum.
Sans verser dans une vaine tentative de justification concernant ce pouvoir mystique, Baloum promit aux jeunes de les aider.
Il leur parle seulement en ces termes :
« Si vous le voulez bien, moi, je suis prêt à vous aider mais vous devrez m’apporter quelque chose de très important qui entre dans la préparation de ce gris-gris.
Si vous réussissez à me l’amener, bientôt vous ferez des récoltes meilleures que les miennes.
Est-ce que vous êtes prêts ?»
Les jeunes, qui semblaient déterminés, n'ont pas trouvé d’inconvénients à répondre par l’affirmatif.
Il leur ordonna de lui apporter une grande quantité de fumier mais transporté sur leur tête.
Les jeunes devaient ramasser à la sueur de leur front du fumier pour enrichir leurs champs.
Les jeunes lui remercièrent en lui promettant de lui apporter ce qu’il a demandé avant le début de la saison.
Dès ce jour, ils se mirent au travail assidûment pour pouvoir disposer de cette chose exigée par le magicien.
Tous leurs temps d’oisiveté étaient désormais occupés par le ramassage de fumier.
Et au fur et à mesure qu’ils avançaient, ils se rendaient compte que c’était une énorme entreprise car réunir la quantité demandée était loin d’être une mince affaire.
Le travail dura 4 mois et ils eurent enfin ce qui était demandé.
Ils répartirent voir Baloum, qui tout en louant leur courage, promît de faire le nécessaire pour qu’ils aient le gris-gris avant la première pluie.
Quand la première pluie de la saison fut là, les jeunes allèrent réclamer leur produit mais ils furent surpris quand le vieux leur dit sèchement d’aller semer leurs champs sur lesquels ils avaient mis le fumier sans ajouter autre chose.
Ils répartirent le faire mais ils étaient un peu déçus par cet homme dont ils avaient commencé à douter de sa bonne foi.
Quand la période des labours fut là, il ordonna encore aux jeunes d’aller labourer les champs déjà semés.
Tous les travaux champêtres furent faits par les jeunes sur les consignes de Baloum sans aucune poignée de gris-gris.
Quand les moments des récoltes vinrent, les jeunes et même tout le village furent surpris de constater que les champs de ces jeunes étaient les plus verdoyants et prometteurs.
Ils eurent les meilleures récoltes que le village n’avait jamais connues.
Lorsqu’ils répartirent avec joie pour remercier Baloum, il leur fit la morale en leur expliquant que c’est en préparant son champ soigneusement, en lui apportant du fumier qu’il fallait, qu'on ferait de bonnes récoltes.
C’était le seul gris-gris qu’il avait et à partir de ce jour-là, tout le village comprit que c'est au bout du travail minutieux que se trouve la réussite.